
José Bové réclamait déjà en 2001, « la refonte de la gouvernance mondiale » au nom de laquelle les garanties sociales et démocratiques conquises dans le cadre des nations devraient s'effacer, au grand bénéfice des multinationales?
Le 7 septembre (Cancun 2003), il a lancé : « J'ai surtout envie que l'OMC reste sur les questions commerciales, les organise selon des règles. Et que, quand ces lois du commerce entrent en conflit avec d'autres droits, il y ait une institution au dessus, qui s'appelle l'ONU ».C'est l'ONU qui défendrait les services publics, les conventions collectives, les statuts nationaux, remis en cause depuis des années par le GATT, puis l'OMC, et aussi l'Union européenne?
Qui peut croire une chose pareille?
François Loos, ministre délégué au Commerce extérieur à Davos en 2003 : "On fait de la gouvernance mondiale pour faire de la redistribution. C'est humainement ce que l'on veut."
Touchant...
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Plusieurs organisations syndicales internationales (1), participant au Forum social mondial de Porto Alegre et regroupées sous une même bannière intitulée "Global Unions", ont adressé une "déclaration syndicale" à ce forum et au Forum économique mondial de Davos, qui se sont tenus simultanément fin janvier. Cette déclaration revendique "une action urgente pour assurer une gouvernance efficace mondiale".
Qu'est-ce que cette notion de "gouvernance", répétée au moins huit fois dans la déclaration de deux pages de ces organisations ?
"La mondialisation, précise ce texte, a besoin de gouvernance pour que les citoyens et les citoyennes, où que ce soit dans le monde, aient la garantie de disposer de leurs droits fondamentaux et de la règle de droit."
Assurément, il est urgent de mettre un coup d'arrêt à la déferlante de déréglementation qui détruit partout dans le monde les conquêtes sociales que sont les Codes du travail, les conventions collectives, les régimes de protection sociale collective inscrits dans le cadre de chaque nation. Mais est-ce de cela qu'il s'agit ?
La déclaration poursuit :
"Un élément essentiel de la gouvernance mondiale passe par le besoin pour le FMI, la Banque mondiale et l'OMC d'agir de concert avec l'appareil des Nations unies, et par la nécessité pour ces institutions d'être plus transparentes et démocratiquement responsables."
On a ici du mal à comprendre : en Europe, on le constate tous les jours, l'Union européenne foule aux pieds les législations protectrices nationales.
En Afrique, en Asie, en Amérique latine, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale
interviennent comme en terrain conquis dans tous les pays, au mépris des souverainetés nationales, pour imposer leurs diktats de privatisation et de destruction sociale.
Que peut-il y avoir de "transparent" et de "démocratiquement responsable" là-dedans ?
(1) Il s'agit de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), de plusieurs fédérations syndicales internationales (incluant : FITBB, UITA, IMF, ISP, IE, FITTHC, ITF, ICEM), de l'Union Network International (UNI), de la Commission syndicale consultative (TUAC) auprès de l'OCDE, de la Confédération mondiale du travail (CMT) et de la Confédération européenne des syndicats (CES).
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Forum social européen de Saint-Denis 2003. Les axes du prochain Forum social européen de novembre à Paris-Saint-Denis sont connus : « Pour une Europe de la paix et de la justice, de la solidarité, ouverte au monde ; pour une Europe des droits, sociale, démocratique ; pour une société de justice sociale, écologiquement soutenable ; pour la souveraineté alimentaire ; pour une Europe démocratique de l'information, de la culture et de l'éducation ; pour une Europe accueillante aux migrants, aux réfugiés, aux demandeurs d'asile. »
Tout cela est bel et bon. Mais pas un mot ni sur le traité de Maastricht, ni sur le Parlement européen, ni sur les directives européennes, qui, l'une après l'autre, privatisent et déréglementent. Pourquoi ce silence ? Ne serait-ce pas parce que beaucoup des organisateurs... et des « financeurs » de ce Forum social européen ont voté oui au traité de Maastricht ?
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Il faut bien admettre que l'ensemble des problèmes qui affectent les classes sociales les plus défavorisées, et en premier lieu la classe ouvrière, s'inscrivent dans ce qu'on nomme la mondialisation.
D'après les observateurs, c'est un véritable cri d'alarme qu'a lancé le 24 février le Bureau international du travail (BIT). Le rapport intitulé " Une mondialisation juste : créer des opportunités pour tous " estime urgent de repenser la gouvernance mondiale.
Quelle gouvernance mondiale ? Sinon celle imposée par les sociétés multinationales à dominante américaine, qui, au nom de leurs intérêts, imposent aux Etats-nations, ou ce qu'il en reste, leur propre conception du monde.
Le rapport nous apprend que la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation estime que " le fonctionnement actuel de l'économie mondiale souffre de déséquilibres profondément ancrés et persistants, qui sont inacceptables sur le plan éthique et intenables sur le plan politique " . Le constat est juste. Mais alors, une question s'impose.
Pourquoi le BIT a-t-il abandonné le
système conventionnel existant depuis sa création, au profit d'une vague déclaration de bonnes intentions, contenue dans une Charte des droits fondamentaux, sans aucun contenu formel et sans moyen coercitif, sinon ceux de bonnes intentions ?
Ce n'est donc pas un événement fortuit si l'ancien président américain Clinton s'était déplacé personnellement à Genève, devant l'assemblée générale du BIT, pour y défendre la nouvelle procédure, aussi efficace qu'un cautère sur une jambe de bois.
Implicitement, le rapport de la Commission mondiale du BIT nous donne raison dans notre Critique de la Charte des droits fondamentaux et de son inefficacité, en tirant lui-même un bilan négatif de la nouvelle procédure.
La mondialisation et ceux qui l'animent ont engagé la guerre contre les îlots de résistance au néolibéralisme, et en premier aux Etats-nations, obstacles à l'hégémonie impérialiste mondiale.
Les thèmes sur la régionalisation et sur la décentralisation prennent leur place dans la stratégie mondialiste pour un État encore plus puissant à l'échelle internationale, et toujours plus décentralisé à l'échelle nationale.
Angelo Geddo
(semaine du 3 au 9 mars 2004 - n°630)
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Le 20 septembre, à l’invitation
des présidents Chirac et Lula,
près de 50 chefs d’Etat se sont
réunis à New York pour un
« sommet sur le développement
» à l’ONU.
C’est à cette occasion que
Jacques Chirac a prononcé son
fameux discours, qualifié
d’ « altermondialiste » par Le
Figaro.
Cette conférence avait été préparée
par une commission de
travail mise en place par
Jacques Chirac (dont on lira la
composition dans notre encadré).
A deux semaines du Forum
social européen (FSE) de
Londres, nos lecteurs seront
intéressés d’apprendre que tous
ses organisateurs se sont félicités
de cette rencontre et de ses
conclusions.
Le rapport produit par
cette commission — qui
a servi de base au discours
de Jacques Chirac —
énumère plusieurs propositions,
taxes à vocation
environnementale, taxes
additionnelles sur les sociétés,
taxes sur les ventes d’armement
et surtout « taxes sur
les transactions financières ».
Mais il précise immédiatement que ces taxes « ne sont
pas étudiées dans une optique
de lutte contre la spéculation,
mais dans une optique de
financement. Il s’agit donc de
taxes à taux suffisamment
faibles pour ne pas perturber le
fonctionnement des marchés. »
LUTTER CONTRE
LES INÉGALITÉS
SANS TOUCHER
À LA SPÉCULATION,
AUX FONDS
DE PENSION...
BREF, AU
CAPITALISME ?
Les choses sont donc clairement
dites : il ne s’agit pas de
lutter contre la spéculation ni
de gêner les marchés.
C’est ainsi que le rapport
considère que « la croissance
réduit certes la pauvreté. Mais
la pauvreté est aussi un obstacle
à la croissance. » Son
objet vise donc à aider au
bon fonctionnement de
l’économie : moins de
pauvres signifie plus de
« consommateurs ».
Mais les faits sont là : la
« croissance » dont parle ce
rapport se limite à la croissance
de la spéculation, des
bénéfices, et à un appauvrissement
de la grande masse
de l’humanité livrée à la
famine, aux guerres, à la précarité,
au chômage.
Mais de cela, les auteurs du
rapport n’en ont cure : « On
peut aussi avoir plusieurs
objectifs : corriger les externalités
négatives générées par
certaines activités économiques,
moraliser la vie internationale,
redistr ibuer les
revenus et lutter contre les
inégalités. » Lutter contre les
inégalités sans toucher à la
spéculation, aux fonds de
pension, aux délocalisations,
bref, au capitalisme ? Ah
bon...
Le rapport vise donc à
« moraliser » le capitalisme. Il
« est le fruit de débats et
réflexions communes entre
personnalités d’horizons
divers et de sensibilités différentes.
Aucune n’est en désaccord
avec l’approche générale
et la philosophie du rapport. »
Ainsi, les représentants
d’OXFAM et d’ATTAC,
organisateurs du FSE de
Londres, partagent la « philosophie
du rapport » et le
disent explicitement dans un
communiqué d’ATTAC du
21 septembre. Ils écrivent :
« Lors des rencontres qui ont
eu lieu avec le président de
République pour préparer le
G 8 à Evin, les associations
civiles, dont ATTAC, avaient
indiqué à Chirac qu’il serait
bien avisé de provoquer une
réflexion (...). Cette demande
a porté ses fruits. Jacques
Chirac décidait de créer un
groupe de travail (…).
ATTAC a été invitée à se
joindre à ce groupe de travail.
C’est le secrétaire du conseil
scientifique, J. Cossart, qui a
été désigné. »
Et ATTAC de publier la
conclusion de Cossart : « Mon
premier étonnement et ma
grande satisfaction est de
constater que ce groupe si
divers est arrivé à un constat
unanime : la mondialisation actuelle provoque une croissance
considérable des inégalités
dans de très nombreux
domaines. Face à ces conséquences
dommageables et
dangereuses, et pour mobiliser
les ressources capables d’y
remédier, une fiscalité internationale
est possible et nécessaire.
»
Ainsi, les principaux
organisateurs et financiers du FSE, les altermondialistes
qui « luttent » contre le capitalisme
se retrouvent avec
Chirac, celui-là même qui
casse les retraites et la Sécurité
sociale…
Cela ne donne-t-il pas déjà
une idée de l’objectif du prochain
FSE ?
LUCIEN GAUTHIER (semaine du 29 septembre au 6 octobre 2004 - n°660)
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On y trouve :
- Kevin Watkins, directeur de la recherche chez
OXFAM (l’une des plus grandes ONG au monde, organisateur
du Forum social européen en octobre à Londres) ;
- Anne Lauvergeon,
ex-conseillère de Mitterrand et aujourd’hui présidente
d’Areva, et plusieurs autres patrons (Suez, Crédit lyonnais) ;
-
Fleming Larsen, directeur européen du FMI, et... J. Cossart,
membre du conseil scientifique d’ATTAC.
Altermondialistes, représentants des patrons, directeur du
FMI, tous ensemble…
(semaine du 29 septembre au 6 octobre 2004 - n°660)
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Le 18e Congrès de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) vient de se tenir au Japon. La CISL s'est constituée en 1949, au
moment où le monde entrait dans une crise, plaçant, d'un côté, les démocraties classiques et les organisations syndicales et politiques attachées à ces valeurs et, de l'autre, celles ayant fait allégeance aux systèmes staliniens, habilement présentés sous l'appellation de " démocraties populaires ".
Les ruptures déjà prononcées au plan national dès 1947 trouvaient leur aboutissant au plan international, avec le " rideau de fer ".
En 1949, le syndicalisme international est divisé en trois organisations : la Fédération syndicale mondiale (FSM), d'obédience stalinienne, la Confédération mondiale du travail (CMT), démocrate-chrétienne, et la CISL, regroupant les organisations attachées à l'indépendance syndicale.Avec l'effondrement de l'URSS après 1989, on assiste à une redistribution des cartes, tendant à effacer les anciens clivages.
La mondialisation et l'émergence de l'économie globale viennent remettre en cause les anciennes structures reposant sur les Etats-nations. Place désormais aux grands ensembles et au principe de subsidiarité qui en constitue la charpente.
La globalité s'élargit en poussant à l'effacement des barrières sociales, et, en premier lieu, celles résultant de la division de la société en classes sociales aux intérêts antagoniques, au profit d'un cosmopolitisme fondé sur les seuls individus, tentés naturellement de renouer des liens de fratrie avec des communautés culturelles, religieuses ou ethniques, base d'un nouveau totalitarisme.
Ceux qui se nomment aujourd'hui " altermondialistes ", rejetant la nation comme cadre politique, se retrouvent dans cette orientation pour vanter les vertus de la " démocratie participative ". Exit donc la question sociale : place aux " questions de société ". Cela ne mange pas de pain.
A l'occasion de son congrès, dans un projet de résolution, la CISL jette les bases d'une réorganisation organique du syndicalisme international, intégré dans une structure mondialiste.
Dans ce projet, la CISL, en se réclamant d'un " altermondialisme ", reconnaît en outre " l'urgent besoin d'obtenir un soutien politique et public à nos politiques en développant un projet politique, pour aborder la mondialisation ". Le projet ajoute : " Le congrès charge dès lors le secrétaire général d'intensifier les efforts de la CISL pour construire des alliances appropriées avec des groupements politiques et d'autres organisations de la société civile qui partagent les valeurs et objectifs du mouvement syndical international. Le congrès demande aux organisations affiliées de soutenir ces efforts, par le biais d'une action à l'échelon national. "
Ce nouvel " internationalisme syndical " (sic) ressemble fortement à un engagement vers " l'altermondialisme " et les ONG engagées sur le terrain de l'édification d'une " gouvernance mondiale ".
Par rapport à la conception qui demeure la nôtre d'un syndicalisme agissant sur le seul terrain de classe, pour la défense des intérêts particuliers des travailleurs et de la classe ouvrière au sens large du terme, en toute indépendance à l'égard des partis politiques, du patronat, des Eglises et des gouvernements, quels qu'ils soient, le projet de la CISL se situe aux antipodes de ce postulat, l'élaboration d'un " projet politique "
demeurant de la seule responsabilité des partis politiques.
Pour nous, le cadre national à l'intérieur duquel s'exerce la démocratie politique, d'une part, et, d'autre part, celui où se construisit l'édifice social prenant en charge les intérêts des salariés, demeure toujours l'espace où se confrontent directement les intérêts de classe, en relation avec la solidarité internationale.
Karl Marx a écrit : " La lutte de classe est internationale dans son principe. Elle est nationale dans sa forme. " C'était vrai hier. C'est toujours vrai aujourd'hui.
C'est la raison pour laquelle l'internationalisme prolétarien est antinomique à l'altermondialisme.
A.G. (semaine du 23 décembre 2004 au 5 janvier 2005 - n°672)
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